Témoignages

Je me suis sentie seule tout au long de la maladie de ma mère. Très vite, je me suis retrouvée aidante car mon père était dans le déni de sa maladie. A m’investir dans les tâches ménagères, à m’occuper de mes petits frères, à soutenir ma mère. Sans arme, sans connaissance, sans aide, sans référent. Même mes profs fermaient les yeux. Jamais aucun soignant, ni médecin qui suivaient ma mère ne se sont posé la question de m’aider. J’étais l’aidante naturelle. Sans oublier les phrases faciles, culpabilisantes de l’entourage du style « Laisse tomber, c’est pas à toi de gérer ça » ou au contraire « C’est toi l’aînée, c’est ton fardeau ». Mais c’est impossible pour moi, je ne peux pas l’abandonner. Même si, au quotidien, c’est devenu rapidement un poids dans tous les sens du terme. Comme on nous aide pas, on peut devenir dur, maltraitant jusqu’à retourner sa colère contre soi. Aujourd’hui ma mère va mieux psychologiquement. Elle est aidée chaque semaine par des professionnels. On commence à sortir de l’enfer. J’ai l’impression de retrouver ma mère et de reprendre ma place d’enfant, à 26 ans. Le plus fou dans tout ça c’est que ma mère est devenue mon aidante pour perdre du poids. Aujourd’hui, c’est à moi de me construire.

Nessie, 26 ans, aidante depuis ses 14 ans, de sa mère atteinte d’un syndrome parkinsonien

J’aide à tout à la maison, faire à manger, faire les courses, m’occuper de mon petit frère. C’est compliqué car j’ai aussi des problèmes de santé. Mais je dois faire avec, je n’ai pas le choix. Mes parents en sont conscients et ne le vivent pas bien. Surtout que mon autre frère se repose aussi sur moi. Heureusement, j’ai des copains et je suis entouré par la famille. Finalement, aider mes parents au quotidien, c’est naturel depuis que je suis tout petit.

Théo, 17 ans, dont les deux parents sont handicapés

«La maladie de Huntington s’est déclarée de très bonne heure chez mon papa. C’est une maladie dégénérative du système neurologique qui lui a été transmise par sa mère. C’est au collège que j’ai commencé à prendre conscience de la situation. Quand il a été mis en arrêt de travail pour inaptitude. Là j’ai réalisé que les choses allaient changer pour lui et pour nous. Quand les symptômes ont commencé à se manifester et se voir quotidiennement, c’était très dur à accepter de ne pas avoir un papa « normal ». Je ne parlais que très rarement de ma situation à la maison par honte ou peur d’être jugée par les autres. Je ne parlais jamais de ce qui se passait à la maison. Pour moi, vivre une adolescence normale était un bon équilibre. En laissant les problèmes de «grande» une fois la porte de chez moi passée. De pouvoir profiter sans porter avec moi le bagage du papa malade. Sans aucune pitié de la part de mes amis. Pour les coups durs, je pouvais compter sur mon frère. Mais ce ne fut que plus tard, quand la maladie a commencé à le diminuer que mon rôle de jeune aidante est arrivé naturellement. Enfin disons jeune aidante en second, car ma mère gérait presque tout. J’ai toujours refusé de faire certaines tâches comme le laver. Pour me protéger. Au bout d’un moment, c’était devenu ingérable pour ma mère, surtout que je n’étais plus à la maison. Avec des conséquences sur sa santé à elle. On n’avait plus le choix, mon père a été placé en Maison d'Accueil Spécialisée (MAS). Je n’ai compris que récemment le rôle que j’avais joué était aussi celui d’aidante. Je garde une expérience très positive de tout ça malgré les moments difficiles, avec une maturité acquise très tôt. Il fallait profiter de chaque moment de bonheur et de quiétude que le quotidien nous apportait.»

Lucie, 29 ans, aidante de son père atteint de la maladie de Huntington